Méga-procès à Londres pour une catastrophe environnementale en 2015 au Brésil

AFP

17/10/2024 | 858 mots | ENERGIE RECRUTE | ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

Un procès à plusieurs dizaines de milliards de livres pour l'une des pires tragédies environnementales de l'histoire du Brésil: la justice britannique examine à partir de lundi la responsabilité du géant minier australien BHP dans la rupture en 2015 d'un barrage de résidus miniers.

Cette catastrophe a fait 19 morts et privé plus de 600 personnes de leur domicile. Une gigantesque coulée de boue de déchets toxiques s'était répandue sur 650 kilomètres le long du fleuve Rio Doce, jusqu'à l'océan Atlantique, tuant des milliers d'animaux et dévastant des zones de forêt tropicale protégée.

"Une telle chose ne peut pas rester impunie", lance auprès de l'AFP Pamela Rayane Fernandes de Sena, 30 ans, dont la fille de cinq ans, Emanuele Vitoria, a été tuée lors du drame. Elle dit vouloir rester "ferme et forte" pour obtenir "justice".

Le barrage avait cédé près de la ville de Mariana, dans l'État de Minas Gerais (sud-est). La coulée avait totalement submergé le village de Bento Rodrigues, où elle vivait. Et 280.000 personnes s'étaient retrouvées sans accès à l'eau.

"Je ne suis pas là pour l'argent, mais pour témoigner", pour Emanuele, "alors je ne vais pas renoncer", assure la jeune femme, qui décrit ce procès londonien comme son "seul espoir".

- Prescription -

Le montant des dommages et intérêts réclamés dans ce procès civil promet d'être gigantesque: il est évalué à 36 milliards de livres au total (43 milliards d'euros), à la hauteur du nombre de plaignants, plus de 620.000, dont 46 municipalités brésiliennes, des entreprises et plusieurs peuples autochtones.

BHP est copropriétaire, avec le groupe brésilien Vale, de la compagnie minière brésilienne Samarco qui gérait le barrage. A l'époque des faits, le groupe avait deux sièges mondiaux, dont un à Londres, ce qui explique ce procès dans la capitale britannique.

Le volet britannique a été ouvert "car BHP, Vale, mais aussi le gouvernement et les institutions judiciaires du Brésil ont échoué lamentablement à garantir une réparation juste et adéquate aux victimes", a dénoncé lors d'une conférence de presse Tom Goodhead, directeur général de Pogust Goodhead, le cabinet londonien des plaignants.

Il assure notamment que la majorité des personnes indemnisées n'ont reçu "que quelques centaines de livres".

En outre, "aucune sanction pénale n'a été prononcée" à ce jour, relève-t-il. "Des poursuites pénales sont toujours en cours au Brésil, mais certaines accusations sont prescrites en raison du temps écoulé."

- "Inutile" -

BHP, qui estime que l'eau du fleuve a retrouvé sa qualité d'avant la rupture du barrage, se dit "pleinement conscient des impacts" de la catastrophe et "inébranlable" dans sa volonté d'indemnisation, mais juge ce procès britannique "inutile", estimant l'affaire "déjà couverte" par les procédures brésiliennes.

Le groupe assure notamment que plus de 200.000 des plaignants du procès de Londres ont déjà reçu compensation et que la fondation Renova, qui gère les programmes d'indemnisation et de réhabilitation au Brésil, a déjà versé plus de 7,8 milliards de dollars (7,2 milliards d'euros).

En avril, BHP et Vale ont fini par proposer à la justice brésilienne 127 milliards de réais (20,6 milliards d'euros) d'indemnisations, dans l'espoir de mettre un point final à la majorité des procédures dans ce pays. Ce montant est toujours en négociation.

Après plusieurs rebondissements devant la justice britannique, l'énorme procès qui s'ouvre lundi doit durer jusqu'à début mars. Il devra déterminer l'éventuelle responsabilité de BHP.

La décision n'est pas attendue avant le 2e trimestre de l'an prochain, estime la compagnie. Si sa responsabilité était reconnue, un autre procès serait organisé, sans doute fin 2026, pour évaluer le montant des dommages de chaque plaignant.

En juillet dernier, BHP et Vale se sont mis d'accord pour payer chacun 50% des indemnisations éventuelles dans les procédures britannique et brésilienne, mais aussi dans une autre aux Pays-Bas.


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